Au service de l’expression de quoi sont les moyens de mise en scène utilisés dans ces extraits ?
La Mouette de Tchekhov
La mouette est le symbole de l’histoire de Nina, aimée par Konstantin qui lui a écrit une pièce. Persuadée de sa vocation d’actrice, elle s’enfuit avec Trigorine, un écrivain reconnu, amant de la mère de Konstantin. Mais elle ne rencontrera pas la réussite, reniée par sa famille et délaissée par son amant. Lorsque, à l’acte II, Trigorine voit une mouette que Konstantin a abattue, il imagine comment il pourrait en faire le sujet d’une nouvelle : « Une jeune fille passe toute sa vie sur le rivage d’un lac. Elle aime le lac, comme une mouette, et elle est heureuse et libre, comme une mouette. Mais un homme arrive par hasard et, quand il la voit, par désœuvrement la fait périr. Comme cette mouette ». La mouette devient le symbole de l’existence de Nina, heureuse près de son plan d’eau mais détruite par le chasseur Trigorine.
Le soulier de Satin (Paul Claudel)
Un dossier autour de cette représentation intégrale du Soulier de Satin en 2009 (Mise en Scène : Olivier PY ; durée 11 h)
Le chef d’oeuvre de Paul Claudel. Dans sa version complète, la pièce dure plus de dix heures : drame de la tension entre l’amour et l’engagement. Le mariage pour Claudel vaut par l’engagement qui l’a fait exister, non par l’amour ressenti.
Doña Prouhèze offre à la vierge son soulier de satin et la prie de ne pas aller pleinement vers le péché :
Je me remets à vous ! Vierge mère, je vous donne mon soulier ! Vierge mère, gardez dans votre main mon malheureux petit pied ! Je vous préviens que tout à l’heure je ne vous verrai plus et que je vais tout mettre en œuvre contre vous ! Mais quand j’essayerai de m’élancer vers le mal, que ce soit avec un pied boiteux ! La barrière que vous avez mise, Quand je voudrai la franchir, que ce soit avec une aile rognée
L’action de ce drame est située à la fin du XVIe siècle en Espagne. Doña Prouhèze, mariée au vieux juge Pélage, est amoureuse de Don Rodrigue, et réciproquement. Doña Prouhèze demande la protection de la Vierge, et lui confie son soulier pour ne s’élancer que « d’un pied boiteux » vers le péché. Rodrigue est envoyé à la conquête de l’Amérique. Prouhèze, elle, se voit confier par Pélage le devoir d’aller défendre la citadelle africaine de Mogador contre les infidèles. Elle y parvient avec l’aide de Don Camille qui la désire et à qui elle cède. Après de longues années, Rodrigue met le siège devant Mogador. Prouhèze se présente alors à lui comme envoyée du commandant. Elle veut lui remettre l’enfant qu’elle a conçu avec Don Camille en pensant à lui. Après cette ultime entrevue, ils se séparent. Prouhèze rejoint Don Camille pour mourir avec lui dans l’explosion de la citadelle. Elle restera pour Rodrigue « cette étoile qu’on ne rejoint jamais ».
DONA PROUHEZE : – Si je me donne, est-ce autrement que tout entière ?
DON PELAGE : – Non pas entière.
DONA PROUHEZE, lentement : – Non pas entière, non pas entière !
Ah ! Parole trop vraie ! dure et véridique parole !
DON PELAGE : – Vous ne pouvez donner à un autre ce que vous avez remis une fois pour toutes
A Dieu de qui j’ai reçu mandat en ce qui concerne votre personne.
DONA PROUHEZE, à voix basse : – Dieu… Dieu… Une fois pour toutes…. une fois pour toutes. …
DON PELAGE : – Ce que vous lui remettrez, ce n’est plus vous-même,
Ce n’est plus l’enfant de Dieu, ce n’est plus la créature de Dieu.
A la place du salut, vous ne pouvez lui donner que le plaisir.
Ce n’est plus vous-même, c’est cette chose à la place qui est l’oeuvre de vous-même, cette idole de chair vivante. Vous ne pouvez lui donner que des choses limitées.
DONA PROUHEZE : – Le désir que j’ai de lui ne l’est pas.
DON PELAGE : – Vous-même, que lui demandez-vous ? et qu’êtes-vous capable de lui donner en retour ?
DONA PROUHEZE : – Rien qui puisse lui suffire, afin qu’il ne cesse pas de me désirer.
DON PELAGE : – C’est le désir des damnés.
Paul Claudel, Le soulier de Satin, Acte II, scène 4
Un extrait du film de Manuel de Oliveira (Dona Prouhèze et Don Camille, Troisième journée scène 10) :
Article sur un blog littéraire
Oh les beaux jours ! (Samuel Beckett)
Acte I – Winnie, Willie.
Tu sais le rêve que je fais quelquefois ?(Un temps.) Le rêve que je fais quelquefois, Willie ?(Un temps.) Que tu viendras vivre de ce côté que je puisse te voir. (Un temps. Elle revient de face.) J’en serais transformée. (Un temps.) Méconnaissable. (Elle se tourne un peu vers lui) Ou seulement de temps en temps, que je me repaisse de toi. (Un temps. Elle revient de face.) Mais tu ne peux pas, je sais. (Elle baisse la tête) Je sais. (Un temps. Elle lève la tête.) Enfin – (elle regarde la brosse) – plus pour longtemps, Winnie – (elle regarde la brosse) – ça va sonner. (Le crâne chauve de Willie, partie postérieure, apparaît au-dessus de la pente du mamelon. Winnie regarde la brosse de plus près.) Solennellement garantie… (elle lève encore la tête)…comment c’était encore ? (La main de Willie réapparaît tenant le canotier qu’0elle ajuste sur le crâne, coquettement de biais, puis disparaît)…ah ! soie de porc ! (Un temps.) Qu’est-ce que c’est un porc, au juste ? (Un temps. Se tournant un peu vers Willie.) Qu’est-ce que c’est au juste, Willie, un porc ? (Un temps. Se tournant vers lui un peu plus, suppliante.) Willie, je t’en supplie, qu’est-ce que c’est, un porc ?
Un temps.
WILLIE – Cochon mâle châtré. (Winnie a une expression heureuse.) Elevé aux fins d’abattage.
(Winnie revient de face. L’expression heureuse augmente. Willie ouvre son journal, mains invisibles. Les pages jaunies viennent encadrer sa tête. Winnie regarde devant elle, expression toujours heureuse.)
WINNIE – Oh le beau jour encore que ça aura été, encore un ! (Un temps.) Malgré tout.(Fin de l’expression heureuse) Jusqu’ici.
Théâtre à la fois philosophique et langagier que celui de Beckett. Mise en scène d’une humanité balbutiante, à peine émergée de l’animalité, ou qui y retourne. Un classique du théâtre de l’absurde.
Un dossier accompagnant une représentation
Avec un acteur masculin :
Version historique avec Madeleine Renaud
Hamlet (Shakespeare)
Philippe Torreton à Grignan
La vie est un songe (Calderon)
Sigismond a été enfermé dans une geôle depuis sa naissance parce qu’il était annoncé qu’il serait un tyran. Son père va tout de même le placer un jour sur le trône pour voir comment il se comporte, puis « l’éveiller » dans sa geôle comme si cela avait été un songe. Un chef d’oeuvre du théâtre espagnol du 17ème : baroque et métaphysique